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Parler de toute grâce au rire : rencontre avec Yann Marguet
À la radio, Yann Marguet prête sa voix à Sexomax, un conseiller sexuel. L’humour lui permet d’aborder frontalement les problèmes des personnages qu’il invente. Parcours d’un enfant de Sainte-Croix, des bancs de la faculté jusqu’aux scènes de spectacle.
Des vidéos de ses chroniques suivies par des milliers d’internautes jusqu’aux scènes de toute la Suisse, Yann Marguet se rapproche désormais en chair et en os de son public. Son spectacle Exister, définition compte pour l’instant 70 dates et affiche systématiquement complet. Après avoir exploré pendant trois ans l’essence des choses dans sa chronique Les Orties de Couleur 3, le Vaudois s’attaque cette fois-ci au sens de la vie. Tout un programme.
Un destin que l’enfant du village de Sainte-Croix n’aurait pas soupçonné. « Au moment de faire mon choix d’orientation, j’étais plutôt perdu. J’ai choisi, par amitié, de suivre un camarade qui avait opté pour HEC. » Une voie qui ne lui conviendra pas. Yann Marguet s’engage alors dans des études de droit, mais après trois années de recherches en criminologie, domaine dans lequel il ambitionne d’écrire une thèse, il opte pour une formation d’enseignant à la Haute école pédagogique de Lausanne. Imprévu : les inscriptions sont closes. Mis sur liste d’attente, il se retrouve au chômage et accepte une proposition de Blaise Bersinger de rédiger ses chroniques pour Rouge FM. Il essaie de les présenter lui-même à l’antenne. Ça fonctionne. Et les propositions s’enchaînent. Couleur 3 le recrute en lui donnant carte blanche pour réaliser des chroniques. « J’ai dû insister pour imposer mon format de huit minutes. Une chronique fait habituellement plutôt entre trois et cinq minutes. Mais j’avais besoin de ce temps pour vraiment saisir le sujet abordé. » Naîtra alors Les Orties : des capsules radiophoniques et vidéo durant lesquelles l’humoriste s’interroge sur un concept ou un détail de la vie quotidienne. La Saint-Valentin, Facebook ou encore le harcèlement ordinaire, l’humoriste décrypte nos fonctionnements et rit de nos paradoxes.
Le projet suivant se forge à partir d’un sms : « Tu fais quoi samedi, Sexomax ? » « Avec mon allié Franck, nous avons voulu créer un personnage à partir de ce nom arrivé par hasard dans notre conversation. » Sexomax donnera donc des conseils sexuels. La chronique s’ouvre toujours par une introduction décalée : reprise du générique de Game of Thrones, parodie de l’émission des Chiffres et des Lettres ou inspirée de l’hymne de La Reine des neiges. Les auditeurs découvrent ensuite la demande de Patrizio qui ne sait pas comment mettre un préservatif, de Bâton qui s’interroge sur le contenu de ses rêves érotiques ou encore d’Alélé qui aborde la question de ses relations sexuelles durant les règles de sa copine. Si l’objectif premier, loin d’une volonté éducative, est de faire rire, l’impact de la chronique n’est pas négligeable. « J’ai reçu des messages d’auditeurs qui me remercient d’aborder certaines thématiques, liées aux pratiques homosexuelles, par exemple. C’est touchant de savoir que Sexomax permet à des personnes de se sentir moins seules dans leurs habitudes sexuelles. »
La formation à la Haute école pédagogique a été laissée de côté. « C’est l’humour qui a véritablement donné un sens professionnel à ma vie. » Lorsqu’il quitte la scène, Yann Marguet cultive sa deuxième passion : les baskets. Le jeune homme, désormais sûr de sa voie, en possède plus d’une centaine de paires.
L'importance de l'humour
À Orbe, la sexologue Patrizia Anex reçoit ses patients dans son cabinet depuis une vingtaine d’années. À côté, elle réalise également des chroniques à la radio intitulées Amour et sexualité. « La sexualité est taboue. Il y a donc beaucoup de croyances et de craintes qui se cristallisent autour de ce sujet. Les chroniques de Yann Marguet et les miennes abordent les mêmes thématiques. Du point de vue scientifique chez moi et de l’humour chez lui. » La spécialiste défend la nécessité d’entretenir un discours positif sur le sexe et ce type d’exercices radiophoniques y contribuent pleinement, selon elle.
« Le sexe et l’humour entretiennent un lien fort. S’autoriser à rire, c’est aussi oser s’épanouir. » La spécialiste utilise d’ailleurs souvent l’humour afin de désamorcer certaines situations lors de ses consultations. « Pour moi, le rire au sein du couple est également garant d’une sexualité vivante. »
D’après Patrizia Anex, la définition de la sexualité est l’élan de vie. Il serait même prouvé qu’une vie sexuelle active agit sur la longévité. C’est le propos que défend également le cardiologue et nutritionniste Frédéric Saldman dans son ouvrage La Vie et le temps paru en 2012 aux éditions Flammarion. Réduction du stress, amélioration de la qualité de sommeil et même diminution de la probabilité de développer un cancer du sein ou de la prostate, seraient ainsi autant de bénéfices engendrés par une sexualité épanouie.